vendredi 29 juin 2007

Du côté des revues

Je ne manque jamais, ou presque, de fouiller les rayons des maisons de la presse à la recherche de revues et magazines abordant des aspects du XVIIIe siècle. Parfois, malgré un titre accrocheur, je reste sur ma faim quand l'article est trop superficiel. Néanmoins, il y a parfois de très bonnes surprises. J'en ferai donc état dans ces billets, soit en fonction de l'actualité des parutions, soit en revenant sur des numéros que je retrouve dans ma bibliothèque personnelle (c'est ce que j'avais fait à propos d'un numéro de la revue musicale Diapason).

Si, de votre côté, vous repérez une numéro ou un article intéressant, n'hésitez surtout pas à me le faire connaître, soit en postant un commentaire, soit en m'envoyant un courriel. Ces colonnes sont un peu les vôtres aussi, Mesdames et Messieurs.

mardi 26 juin 2007

Fanfan en Béarn

L'été dernier, je n'avais malheureusement pas pu me rendre aux fêtes organisées au château de Laas (Pyrénées-Atlantiques).

"Château" est peut-être un bien grand mot pour cette gentilhommière du XVIIe siècle, mais l'endroit est fort agréable, et je suis bien décidé, cette année, à franchir les frontières de mon Pays basque pour me rendre en Béarn, dans cette superbe vallée du gave d'Oloron, et découvrir ces animations organisées autour du thème de Fanfan la Tulipe.

Je ne préjuge ni dans un sens ni dans l'autre de la qualité de ce qui y sera présenté, n'ayant pas eu d'échos avertis, pour l'instant, des fêtes de l'an dernier.
Mais je ne manquerai pas de venir faire état, ici, de mon ressenti et de mettre en ligne quelques-unes des photos que je compte y prendre.

D'ici là, si quelque lecteur ou lectrice envisageait de s'y rendre aussi, n'hésitez pas à vous en ouvrir ici.

lundi 25 juin 2007

Des liaisons à savourer

Dues à la plume de l'officier Choderlos de Laclos, Les Liaisons dangereuses (première édition à Paris en 1782) ont étées l'un des ouvrages les plus lus de la fin du XVIIIe siècle.
Dans ce roman par lettres, "six personages tissent lentement l'une des trajectoires les plus scandaleuses de notre littérature" (Claude Fournet, in Dictionnaire des oeuvres érotiques, éditions Robert Laffont, Collections Bouquins).

Et le cinéma en a tiré au moins deux brillantes adaptations, deux siècles plus tard.

La version de Stephen Frears, Les liaisons dangereuses (1988), est un vrai bijou de réalisation et de jeu d'acteurs. John Malkovich est excellent (comme très souvent) dans son rôle de séducteur au coeur froid (encore que... pas si froid...). Glenn Close colle très bien au rôle machiavélique de la Marquise de Merteuil. Michell Pfeiffer campe très bien Madame de Tourvel, imprenable (?) citadelle de vertu. Et Uma Thurman incarne une délicieuse Mlle de Volanges, trop ingénue pour ne pas être broyée dans la partie d'échecs qui se joue autour d'elle.


Quant au film de Milos Forman, Valmont (1989), il m'a grandement séduit, dans sa narration tout comme dans sa photographie. Je n'ai bien sûr pas pu m'empêcher de faire, dans ma tête, la comparaison la version de Frears. Je n'irais pas dire que j'ai trouvé l'un meilleur que l'autre. Ces deux films m'ont emballé. Mais leur traitement de cette même histoire diffère, notamment quant aux acteurs choisis pour incarner les rôles principaux.
Ainsi, Milos Forman a choisi des acteurs aux personnalités plus "rondes", moins marquées que ceux qu'a choisis Stephen Frears. Ce qui ne veut pas dire qu'un des choix était plus légitime que l'autre, mais simplement que ce sont deux approches différentes.

Par exemple, Colin Firth (le Valmont de Forman) n'a pas le petit sourire carnassier de John Malkovich (le Valmont de Frears). Dans son rôle de séducteur, C. Firth semble plus fragile que Malkovich, presque moins froid.
Et Annette Benning (Mme de Merteuil vue par Forman) donne une impression physique de moins de dureté, ce qui, cette fois-ci, la rend plus dangereuse séduisante que Glenn Close (Mme de Merteuil chez Frears).

Quoi qu'il en soit, deux films à consommer sans modération !

dimanche 24 juin 2007

Portraits de ports

Claude Joseph Vernet, que l'on connaît généralement comme Joseph Vernet, est non seulement un peintre des Lumières, mais probablement celui qui a donné à la peinture de marine son essor et ses lettres de noblesse.
Formé dans sa Provence natale puis à Rome, Joseph Vernet se nourrit de la rencontre entre la tradition nordique réaliste et la tradition décorative italienne. Plus qu'un inventeur de style, il est donc l'artiste d'une rencontre.

Son talent a été repéré par le marquis de Marigny, frère de la marquise de Pompadour, et c'est ainsi que Louis XV finit par commander à Vernet, en 1753, une série de tableaux destinés à tirer le portrait des ports de France. Cette collection des Vues des ports de France doit relever le défi d'être à la fois précise et compréhensible, exacte et vivante. Chaque tableau fourmille donc de détails qui donne de la profondeur aux scènes.

Pour ceux que le sujet intéresse, une visite au Musée de la Marine à Paris simpose. Mais, pour ceux qui sont loin de Paris, il est possible de se faire une idée de ce peintre et de son oeuvre, grâce à la visite de l'exposition virtuelle concoctée par ce musée.
Et une orientation bibliographique sur Vernet, établie par les services de ce musée, est téléchargeable gratuitement au format PDF sur cette page-là.

Enfin, si vous souhaitez tenir entre vos mains un ouvrage moins virtuel sans pour autant vous ruiner, le guide Joseph Vernet - Les vues des ports de France publié par le Musée de la Marine (ISBN 2-901421-16-4) est une excellente porte d'entrée.

Pour ma part, si je suis Bayonnais de naissance et de coeur, les vues du port de Bayonne par Vernet ne sont pas mes préférées. Ce sont ses vues du port de Marseille qui m'enchantent. La reproduction de l'une d'entre elles finira bientôt sur un des murs de mon bureau, soyez-en sûrs !

samedi 23 juin 2007

Par-delà la voix

Les frères Broschi, ça vous dit quelque chose ? Mais oui, voyons, Riccardo, l'aîné, et Carlo, le cadet. Le compositeur et le chanteur. Besoin d'un indice supplémentaire ? Le cadet est en vedette dans mon précédent billet. Oui, Carlo, dit Farinelli.

Le film Farinelli, de Gérard Corbiau (1994), avec notamment Stefano Dionisi, Enrico Lo Verso et Elsa Zylberstein, porte à l'écran une partie de la vie de ces deux frères, et du monde dans lequel ils ont évolué.
Complicité des deux frères jusque dans le partage de leurs amantes. Jalousie, aussi, entre celui qui n'est que très talentueux et celui qui est génial.
Et, au-delà, les rivalités entre les théâtres, la musique de la rue et celles des salons dorées, la puissance des mécènes.

J'ai apprécié le côté flamboyant de certains costumes, et le contraste avec des scènes où la crasse et la misère règnent en maîtresses.
Et, sans pouvoir dire si la voix reconstituée pour le film s'approche vraiment de ce qu'était la voix d'un castrat, je salue ce travail, fruit d'un savant mélange entre une voix de femme et une voix d'homme (celle d'un contre-ténor). Des informations précises sont données sur le site de l'IRCAM, qui a procédé à ce travail (sur cette page-ci ou celle-là, notamment).


Certes, Farinelli n'atteint pas la profondeur ou la puissance d'un Amadeus, mais l'histoire de ces deux frères est très touchante. En particulier le fait que l'un vive dans l'ombre de la gloire de l'autre, et qu'il "mange les miettes" qui tombe de l'assiette de son frère (que ce soit les applaudissements dans un théâtre ou le corps d'une femme dans un lit). Il y a là quelque chose de dramatique.
Mais c'est un film à découvrir ou à redécouvrir. D'autant plus facilement qu'il existe en format DVD à des tarifs tout à fait abordables.

vendredi 22 juin 2007

Ne coupez pas !

Il y a deux ans, dans son numéro 527 (juillet-août 2005), la revue Diapason consacrait un dossier de seize pages aux castrats, sous la plume d'Ivan Alexandre. Le dossier qui aborde divers aspects du sujet, tant sur le plan de l'histoire que sur le plan du répertoire qu'ils chantaient.
La période des castrats court du milieu du XVIe siècle au début du XXe siècle, mais leur apogée couvre le XVIIe et le XVIIIe siècle, que ce soit dans les théâtres ou dans les églises. Et cela, avec la complicité de l'Eglise catholique : si la castration est interdite, Clément VIII (pape de 1592 à 1605), jouant le funambule sur un texte de l'évangéliste Jean, établit qu'il est acceptable de faire des castrats en l'honneur de Dieu. Jusqu'où les arguties théologiques ne vont-elles pas se loger...
Paradoxe de la nature humaine, les castrats, privés des attributs du mâle, gardaient une voix d'enfants mais développaient un corps d'homme adulte, et parfois même un gabarit de colosse [voir note 1]. La combinaison de cette voix cristalline et d'une capacité pulmonaire plutôt hors du commun en faisait des chanteurs aux talents extraordinaires. Autre paradoxe, malgré l'amputation d'une partie de leur virilité, n'en exerçaient pas moins une étrange attraction sur les femmes.

Le dossier nous offre également le portrait de plusieurs de ces castrats, de Ferri (« le pionnier », 1610-1680) à Moreschi (« le dernier », 1858-1922), en passant par Gizzielo (« le galant », 1714-1761). Farinelli, « le dieu vivant », de son vrai nom Carlo Broschi, se voit consacrer un double page du dossier.

Ce numéro de Diapason est encore facilement trouvable. Soit directement auprès de la revue, soit sur des sites de vente de livres d'occasion sur internet. Il me semble constituer une bonne porte d'entrée vers ces artistes si particuliers.



* * * * * *

[Note 1] Les restes de Farinelli ont même été exhumés en 2006 pour permettre une étude des transformations de son corps après la castration. Voir cet article-là, tiré de la revue La tribune.

[Note 2] Quelques portraits et caricatures de Farinelli, sur cette page-là.

jeudi 21 juin 2007

Paris en portfolio

J'avais éclairé de ma lanterne le livre Le Paris des Lumières, superbe invitation au voyage.

Parfois, je me demande si je finirai par craquer pour la reproduction du plan de Turgot présenté en portfolio en tirage limité...

A moins qu'une bonne âme ne se décide à me l'offrir...

Qui sait ? On peut toujours rêver, non ?

mercredi 20 juin 2007

Pour les yeux et les oreilles


A Louis-Armand qui me demandait mes goûts musicaux, dans un commentaire sur le billet sur Vivaldi, plutôt que de tenter le périlleux exercice de la synthèse ou celui de la liste sans fin, je vais répondre par un exemple, avec le coffret DVD du film Don Giovanni de Losey, adapté de l'opéra de Mozart et Da Ponte. Il s'agit, en fait d'un opéra filmé non sur les planches d'un théâtre mais en décors naturels. Le film ne date pas d'hier (il est de 1979), mais il a été réédité en version entièrement remasterisée, notamment pour la bande-son.
Bien sûr, ce genre ne plaira pas à tout le monde (il faut tout même apprécier l'opéra), mais n'ayons pas peur des mots : il s'agit là d'un chef-d'oeuvre cinématographique adapté d'un chef d'oeuvre musical.

Losey a su donner à cet opéra une identité visuelle, photographique, magnifique, utilisant pour cela les décors vénitiens de toute splendeur.
Quant à l'interprétation chantée, le casting est déjà alléchant (Ruggero Raimondi, Kiri Te Kanawa, Jose Van Dam, Teresa Berganza, etc.) et les prestations sont, à mon avis, d'anthologie.
Bref, pour les passionnés ou pour les curieux, une plongée dans une oeuvre superbe et abordable même pour les néophytes.
Cette édition en coffret offre des suppléments très intéressants, ainsi que le libretto complet de l'opéra.

Pour les amateurs d'art, je vous conseille un petit coup d'oeil à un croquis réalisé par Alexander Trauner pour la préparation des décors de ce film. J'en ai découvert un sur cette page-là.
Voici un lien direct vers l'image en question.
Je suis preneur d'autres images de ce genre. Avis à la population !

Marquise... pas exquise

Sans me bercer de trop grandes illusions sur ce que cela pourrait donner, j'avais regardé, voici quelques mois, le téléfilm en deux parties de Robin Davis sur Madame de Pompadour, diffusé sur France 2.

Ce téléfilm met en vedette la marquise de Pompadour (bien sûr), principalement sous la perspective de sa relation amoureuse avec Louis XV, et de ses tracas avec la famille royale et le parti dévot. Cette perspective sentimentale occulte, en grande partie, les autres aspects de l'influence qu'a eue la marquise sur le souverain (l'influence politique, notamment, en particulier dans le "renversement des alliances" au détriment de la Prusse et en faveur de l'Autriche) et aussi sur les arts.

Quant à Louis XV, le portrait qu'en fait ce téléfilm manque un peu de nuances, à mon goût. Certes, le monarque a fait preuve de versatilité, d'indécision, mais cette fiction pousse le portrait vers la caricature. Bon, ce n'était pas comme Didier Bourdon en Louis XV dans le Fanfan la Tulipe de Gérard Krawczyk, mais tout de même...

Deux portraits unidimensionnels, donc, univoques : la marquise presque parfaite et victime des mauvaises gens, et le roi presque benêt. Deux portraits plutôt bien servis par les interprètes principaux, Hélène de Fougerolles (qui manquait un peu de sel, toutefois) et Vincent Perez, mais deux acteurs qui semblaient parfois empruntés dans ce format télé, alors qu'ils sont bien plus à l'aise au cinéma.

J'ai eu un peu de mal, en revanche, à accepter Charlotte de Turckheim (que j'apprécie beaucoup comme actrice par ailleurs) dans le rôle de la reine. Du fait de son âge, elle me donnait plutôt l'impression de pouvoir jouer la mère du roi...
Bref, comme bien de ces genres de téléfilms, la réalisation générale fait "télé" plus que cinéma, et manque donc de pêche, de punch. Ce qui faisait confiner ce téléfilm à la bluette.
En résumé, ce n'était pas vraiment du niveau d'un film comme Ridicule (mais je ne voyais pas cela non plus comme référence face à un téléfilm), mais en-dessous également, à mes yeux, d'un téléfilm comme La bête du Gévaudan de Patrick Volson avec les Stévenin père (Jean-François) et fils (Sagamore).

Avis en demi-teinte, donc.

dimanche 17 juin 2007

Espoirs déçus

Quand j'ai entendu parler de la parution d'un roman policier ayant pour décor la naissance de la franc-maçonnerie moderne à Londres au début du XVIIIe siècle, mon attention a été éveillée. Quand j'ai appris, en outre, que ses auteurs étaient bien au fait de la réalité de ce mouvement (ils en sont membres tous les deux), je me suis dit que le livre éviterait, au moins, les allégations farfelues sur le sujet.

J'ai donc acheté Les mystères de Channel Row, d'Alain Bauer et Roger Dachez (éditions JC Lattès, 2007, ISBN 978-2-7096-2852-5), et je l'ai lu dans la semaine qui vient de s'écouler, plusieurs voyages professionnels en train m'ayant offert des heures de lecture.
Ce livre m'a finalement laissé une impression mi-figue mi-raisin.
J'ai apprécié ce qui, dans le récit, éclaire le lecteur sur le virage donné à la franc-maçonnerie avec la création de la Grande Loge, avec le recrutement de grands gentilshommes censés apporter dignité et richesses aux loges, sur les difficultés rencontrées par la fraternité à la fois à l'intérieur et à l'extérieur de ces loges.
Mais le roman ne tient pas la promesse de sa quatrième de couverture, celle d'une enquête haletante. J'irais presque jusqu'à dire qu'en guise de halètements (de suspense), je n'ai vécu que des soupirs (de quasi-ennui). Mais, pour ne pas être trop sévère, je m'en tiendrai à dire que ladite enquête ne m'a pas tenu en haleine d'un bout à l'autre du livre. En effet, le récit s'étale sur plusieurs années (de 1717 à 1730) et présente de grands « trous » qui ne m'ont pas aidé à rester pris accroché à l'intrigue. Celle-ci, en outre, est légèrement tirée par les cheveux, la rendant peu vraisemblable à mes yeux au point de me laisser un goût d'inachevé quand je suis arrivé à la dernière page du livre.

Suis-je devenu, à force d'en lire, trop exigeant envers les romans policiers ?
Ou bien celui-ci est-il vraiment un ton en dessous de ce qu'il promet ?
Tout autre avis que le mien sera le bienvenu.

samedi 16 juin 2007

Bercé par le fleuve

Le XVIIIe siècle est finissant. En France, la Révolution couve...
Pour avoir passé son épée au travers d'un homme aux amis influents, un aristocrate français est exilé sur les rivages d'Afrique...
Là-bas, autre vie, autre rythme, autres couleurs. Autres amours aussi. Et trois relations : le maître et l'esclave, le père et la fille, l'homme et la femme. Un éloge de la différence.

Les caprices d'un fleuve (réalisation de Bernard Giraudeau, 1996) est un film au rythme lent mais pas lassant. Il vous emporte, nonchalant, comme si vous étiez un navire sur ce fleuve.
Le scénario, de Bernard Giraudeau, est librement inspiré du Journal du chevalier de Boufflers.

Un coup de tricorne à deux très grands acteurs, Bernard Giraudeau et Richard Bohringer. Ce film, malheureusement passé plutôt inaperçu, est à leur image : sincère et entier.

vendredi 15 juin 2007

Justice aveugle

En 1994, le journaliste et écrivain états-unien Bruce Alexander (de son vrai nom Bruce Alexander Cook, 1932-2003) publie Blind Justice, premier roman d'une série qui en contera onze, mettant en scène un personnage historique hors du commun, le juge londonien John Fielding.

Frappé de cécité à l'âge de 19 ans dans un accident de mer, John Fielding s'est rendu célèbre en réorganisant la police et la justice de la capitale anglaise au milieu du XVIIIe siècle.
Bruce Alexander s'est emparé de cette figure pour en faire le personnage central de ses romans policiers, qui sont une véritable délectation. Les éditions 10/18 ont eu la bonne idée de les traduire et publier en français, ce qui les met à la portée d'à peu près toutes les bourses (ils sont au format de poche) et des lecteurs non anglophones.

Si j'ai déjà dit du bien des romans de Jean-François Parot, je ne peux pas faire moins que d'en dire autant, voire plus, de ceux de Bruce Alexander. Je me régale de ces romans, en effet, tant pour le style d'écriture d'Alexander que pour la tension de ses intrigues. J'apprécie tout particulièrement la façon de faire de la ville de Londres elle-même ou des autres décors de ces livres, non pas des décors mais des sortes de personnages des romans à part entière.

Suivez donc le jeune Jeremy Proctor, l'assistant (fictionnel) du juge Fielding, dans les sombres affaires qui secouent Londres.


Pour aller plus loin :
- une
interview anglophone de Bruce Alexander ;
- un extraordinaire site internet sur
les affaires traitées à Old Bailey (surnom de la Cour criminelle où officiait le juge Fielding) ;
- la
référence du portrait de Fielding illustrant ce billet, à la National Portrait Gallery.

jeudi 14 juin 2007

Paris des Lumières

Il n'a pas dû vous échapper que je suis un amateur de beaux livres. Pas des livres pour décorer ma bibliothèque en les achetant au mètre, en fonction de la taille et de l'aspect de leur reliure. Mais de ces livres que l'on prend plaisir à tenir entre ses mains, à lire et relire, de ces livres qui vous font voyager sans bouger de votre fauteuil.

Celui dont je vais vous entretenir aujourd'hui nous entraîne dans Paris. La Réunion des musées nationaux avait en effet publié, voici quelque temps déjà, un livre à l'occasion de l'exposition Paris 1730 d'après le plan de Turgot : Le Paris des Lumières, d'Alfred Fierro et Jean-Yves Sarazin (ISBN 2 7118 4985 6).


Le livre aurait été bien tristounet, s'il s'était contenté de reproduire les vingt planches du plan dit « de Turgot ». (Soit dit en passant, la dernière fois que je suis allé au musée Carnavalet, à Paris, j'ai cru m'étouffer en voyant le prix auquel est vendu la reproduction grand-format de ce plan...).
Mais là, c'est à un tout autre voyage que le livre nous convie, et les reproductions des planches du plan de Turgot ne font pas tout le charme. Les autres illustrations de cette époque - tableaux, gravures, seynettes, etc. - donnent corps à ce Paris du XVIIIe siècle. Debucourt, Raguenet, Wille nous font voir, sentir, entendre la ville, ses rues, son peuple, ses jardins. Et les photographies d'aujourd'hui révèlent la permanence de certains de ces lieux.
L'immersion est d'autant plus facile que le livre est organisée de manière thématique : « Le roi, le prévôt, le peuple de Paris », « Au fil de l'eau, la Seine et ses îles » et autres « Faubourgs des deux rives ».

Osez donc le voyage immobile !

Musique, Antonio !

Dans un commentaire sur un billet consacré à l'activité costumière de Phil, Louis-Armand me demandait « en amateur de la Sérénissime, goûtez-vous Vivaldi ? ».

Aurais-je le courage de répondre « non, pas vraiment » ?
Et pourtant...

Antonio Vivaldi, le prêtre rouge, comme on le surnommait du fait de son état de prêtre et de sa chevelure rousse, n'est pas un des compositeurs dont je me régale les oreilles. Je devrais même dire, pour être honnête, que la musique du XVIIIe siècle est un des éléments de cette période auquel j'accroche le moins.

Et, pour ce qui est de Vivaldi, je ne m'arrête pas au seul fait de trouver insupportable l'association faite entre musique d'attente (sur un standard téléphonique ou dans un cabinet médical) et Les quatre saisons. Cette pièce a été tant charcutée, massacrée, qu'il me faut parfois prendre mon courage à deux mains avant de me remettre à l'écouter.
J'ai découvert Vivaldi quand j'avais 6 ou 7 ans, au travers de la pratique de la mandoline, et notamment ses concertos en do majeur et en sol majeur pour mandolines et cordes qui sont restés gravés dans ma mémoire. Bien plus tard, j'ai découvert d'autres pièces en les chantant, comme son Magnificat. Mais je reste souvent froid devant le côté virtuose de plusieurs de ses oeuvres. Aussi, même si son Stabat Mater m'émeut, j'aime à écouter, de temps en temps, des pièces moins « médiatisées », si j'ose dire, comme sa Serenata a tre (mais celle-ci, en l'occurrence, est mal servie par les enregistrements que j'en ai écoutés).

Si Vivaldi est, pour moi, une porte vers la Sérénissime du Settecento, c'est par d'autres biais, comme le livre La Venise de Vivaldi, de Patrick Barbier (2002, chez Grasset et Fasquelle, ISBN 2-246-58871-5). Cet ouvrage entraîne le lecteur à la découverte de la vie culturelle, religieuse, festive et, plus largement, sociale de Venise.

Alors, par les oreilles ou par les yeux, laissons-nous guider par Antonio.

dimanche 10 juin 2007

Navires de bois et hommes de fer

Wooden ships & Iron Men (WS&IM ; voir sa fiche - en anglais) est un jeu de simulation des combats de la marine à voile, un wargame sur cartes à hexagones et avec pions. Peut-être pas tout à fait un « ancêtre », mais en tout cas un jeu d'un certain âge, puisque sa première publication a eu lieu en 1974, puis en 1975 sous la bannière d'une firme qui a été, pendant longtemps, un « grand » éditeur de jeu de simulation, Avalon Hill. WS&IM n'est aujourd'hui plus édité, mais il garde un communauté assez active de pratiquants.

Ce succès sur la durée peut s'expliquer sur la relative facilité de prise en main de ce jeu, avec des règles de plusieurs niveaux de difficulté, permettant d'apprendre le jeu avec des règles de base, puis, une fois que ses règles de base sont assimilés, de passer aux règles avancées.
Relativement fouillé sans être trop détaillé, WS&IM offre du plaisir sans qu'il soit besoin de s'arracher les cheveux, et simuler des engagements navals de grande ampleur (vous avez dit Trafalgar ?) n'est pas insurmontable.

Toutefois, ce jeu n'est pas exempt de défauts, comme ceux-ci :
- les règles n'empêchent pas un joueur d'opter pour des tactiques qui n'auraient très probablement pas été choisies par des commandants de l'époque [voir note 1]. Comme d'envoyer leurs navires à l'abordage des navires ennemis pour résoudre le combat, une tactique bien trop meurtrière pour être tentée dans des combats de flotte ;
- compte tenu de son échelle, WS&IM est plus adapté pour la simulation d'actions d'escadre ou de flottes, que d'engagements de faible intensité (duel de frégates, par exemple). Or, ces engagements de faible intensité peuvent avoir tout leur charme, surtout pour les joueurs qui n'ont pas envie d'une partie de longue durée avec une vingtaine de navires dans chaque camp.

D'autres jeux de simulation de combat de la marine à voile ont été publiés par la suite. Mais leur nombre reste éminemment faible, presque anecdotique dans l'ensemble de la production de wargames. Il y a, à mes yeux, deux façons d'essayer de comprendre cela, qui d'ailleurs, ne sont pas exclusives l'une de l'autre :
- l'une inhérente au thème : les combats de la marine à voile n'ont pas autant la faveur de wargamistes que les batailles (terrestres) de l'empire napoléonien ou de la deuxième guerre mondiale ;
- l'autre plus particulière à WS&IM lui-même : ses qualités dépassant ses défauts, peu de créateurs ont osé relever le défi de s'engager dans ce créneau déjà étroit et déjà bien occupé par WS&IM.

Pour ceux qui voudraient un peu plus de détails sur le sujet, jetez un regard sur cette discussion-là (le forumiste "Xavier C" n'y est autre que moi).
En outre, j'ai écrit, dans un fanzine, un article tentant d'offrir aux lecteurs, une approche didactique de ce sujet : les navires et le combat naval à l'âge d'or de la marine à voile [voir note 2]. Je ne prétends pas avoir écrit l'article idéal, mais j'ai essayé de brosser les différents éléments à prendre en main avant de se lancer dans une simulation de combat naval de la marine à voile. Tout commentaire sera le bienvenu.

Je reviendrai probablement vous parler d'autres jeux de ce genre.
Mais, si vous voulez découvrir ce jeu par vous-même et que vous n'avez pas d'adversaire potentiel sous la main, vous pouvez vous rendre sur le site internet de Youplay.it, vous permet de jouer à WS&IM à distance, gratuitement. Attention, ce site ne vous fait pas jouer contre un ordinateur, mais contre un autre joueur humain. Ce n'est pas, non plus, comme l'apprentissage avec quelqu'un à vos côtés pour vous conseiller. Mais c'est un pis-aller qui n'est pas désagréable.

Bon vent !


* * * * * *
Notes :
[1] Aucune des grandes batailles de l’époque de l’âge d’or de la marine à voile (Quiberon, Ushant, Camperdown, Aboukir, Trafalgar), n’a comporté d’abordage. L’exception est celle celle de Saint-Vincent : le 14 février 1797, Nelson, récemment promu au commandement du Captain (74 canons), quitte la ligne de bataille anglaise, canonne le trois-ponts San José (112 canons) avant de monter à l’abordage à la tête de ses hommes.
[2] Les curieux pourront trouver cet article dans les pages 68 à 81 du n°1 des Songes d'Obéron, téléchargeable sur cette page-là, ou par ce lien direct vers le fichier au format PDF (attention, fichier de 11Mo).

Le tour de main de Phil

J'avais été tenté, au premier abord, d'intituler ce billet « Le coup de fil de Phil », mais j'ai finalement conclu qu'il serait difficile pour vous de m'accorder votre indulgence pour un si mauvais calembour. Plutôt que de coup de fil, j'ai finalement choisi parler de coup de main, ou de tour de main, pour que vous soyez assurés que ce titre ne se voulait en rien moqueur. Bien au contraire.

Après avoir parlé, dans un précédent billet, des travaux de Lisa en matière de reconstitution de costumes, c'est aujourd'hui sur Phil que je vous invite à porter votre regard, votre curiosité.

Phil s'intéresse à diverses époques, dont le dix-huitième siècle, et il nous fait partager sa passion sur deux blogs : l'un, Les costumes de Phil, consacré à ses travaux terminés, et l'autre, L'atelier de Phil, qui nous fait découvrir les différentes étapes de ses créations.


Moi qui suis malhabile comme pas deux de mes dix doigts, je ne peux que saluer le talent mis au service de la passion. Monsieur Phil, je vous tire mon chapeau, à vous aussi !




[Merci à Phil pour l'autorisation de publication de la photographie dans ce billet]

vendredi 8 juin 2007

Pédagogie dix-huitièmiste

On ne soupçonne pas toujours les richesses des centres pédagogiques. En l'occurrence, celui du Centre national de documentation pédagogique. Il a édité en 2001 un CR-ROM intitulé J'ai vécu au XVIIIe siècle, et présenté plus en détail sur cette page-ci et analysé sur celle-là.

Son contenu semble alléchant :

"Ce cédérom, utilisable en collège et en lycée, est une banque de données de documents multimédias sur la vie quotidienne en France au XVIIIe siècle. La période couverte par les documents va de 1660 à 1790 et concerne surtout la France. C’est une nouvelle édition de la version sur disquettes, remaniée et largement enrichie qui offre 1 687 documents multimédias (textes, affiches, gravures, graphiques) et 89 documents sonores (chansons enregistrées avec des instruments traditionnels et extraits musicaux). Un lexique de 6 700 entrées, accessibles en hypertexte à partir des documents, et des chronologies thématiques affichables à tout moment complète l’ensemble."

Il ne me reste plus qu'à trouver un moyen de mettre la main dessus, et de revenir vous en parler plus avant dans mes billets.

jeudi 7 juin 2007

Embarquer avec James Cook

Comme je n'ai rien du Français chauvin - je pourrais difficilement, l'être, d'ailleurs, étant né un pied de chaque côté de la Bidassoa -, j'invite dans mes Mémoires un Anglais, grand explorateur maritime, en la personne de James Cook.

Je ne vais pas retracer ici la biographie de ce fils de journalier agricole du Yorkshire qui naviguera autour du monde, bien des livres ou des sites internet le font déjà. Je vais plutôt vous donner quelques clés pour le découvrir par vous-mêmes.

Pour l'anecdote, j'ai souvent regetté que Nathaniel Dance, qui a peint le portrait de Cook qui illustre ce billet, ait donné un air si sévère au capitaine. L'était-il autant que cela ? Etait-ce une nécessité que de le dépeindre avec cet air concentré, presque fermé ? Il est vrai que le portrait qu'en a peint John Webber ne le montre pas très souriant non plus.

Ma bibliothèque personnelle compte plusieurs livres consacrés à Cook, dont trois sont d'un abord facile :

James Cook, Relations de voyages autour du monde, éditions La Découverte Poche (ISBN 2-7071-2678).
Il s'agit d'extraits choisis, et non du texte intégral. Tout à fait abordable, donc, pour quelqu'un qui n'aurait pas envie de lire un très long récit, sans pour autant que les coupes lui fassent perdre tout intérêt.

Martin de Halleux, L'inconnu du Pacifique, éditions Bayard Jeunesse (222773907X).
Un roman qui fait parler Cook à la première personne. A la fois un voyage d'exploration et un voyage intérieur. Tout à fait abordable par un adolescent.
Une fiche de lecture est disponible sur cette page-là.

Ouvrage collectif, Les voyages de Cook, éditions Atlas (ISBN 2-7312-0165-7).
Pas très facile à trouver (il remonte à 1986), cet ouvrage qui relate les 3 voyages de Cook est très richement illustré.


Comme il se doit chez nos voisins d'outre-Manche, une "society" s'est créée pour rassembler les personnes intéressées par le capitaine, la Captain Cook Society.
Un certain nombre de pages de ce site est terne, mais la page des liens est particulièrement fournie, avis aux curieux.

mercredi 6 juin 2007

Point d'honneur

Mes pérégrinations sur la toile m'amènent régulièrement sur le weblog du Songe (tenu par un compère que je croise sur les forums de jeu de rôle sous le pseudonyme de Saladdin), pour y glaner, entre autres, des informations sur les thèmes de cape et d'épée ou de pirates.

J'y avais découvert, voici quelque temps, un billet jetant un coup de lampe sur un petit jeu en ligne. L'auteur du billet m'accordera, je pense, de citer ce jeu dans mes propres billets. Si vous êtes tenté(e) de défier quelqu'un sur le pré, pistolet en main, alors n'hésitez plus : transportez-vous dans ce pré-là, et faites parler la poudre !

Un merci à Saladdin de m'avoir fait découvrir ce petit jeu. :-)

mardi 5 juin 2007

Eros vénitien, en vers et aquarelles

Descendant d'une famille patricienne de Venise, né en 1694 et mort en 1768, Giorgio Baffo (appellez-le « Zorzi », si vous voulez sonner vraiment vénitien) est certes moins connu du grand public qu'un Casanova ou un Canaletto, mais il présente deux des visages de la Venise du Settecento : d'un côté le magistrat respecté, de l'autre l'auteur décrié de poésie « barona », c'est-à-dire canaille, l'aristocrate et le décadent, le vertueux et le lubrique.


Les éditions Vertige Graphic ont publié en 2000 une trentaine de sonnets de Baffo, parmi les plus de sept cents qu'il a écrits, dans le livre Sonnets érotiques (2000, ISBN 2908981157). Mais, si la lecture de cette édition bilingue ne manque pas d'intérêt pour ce qui est de découvrir cette poésie canaille, j'ai acheté ce livre parce que les textes sont accompagnés d'aquarelles du maître.
Que dis-je... du Maître !

Car c'est Hugo Pratt qui a été invité à créer autour de ces sonnets. Evidemment, nous ne sommes pas tout à fait dans le même genre que pour le livre Les femmes de Corto Maltese (de Michel Pierre et Hugo Pratt, chez Casterman, 1994), mais le trait de Pratt, s'il est clairement érotique, est bien moins cru que les vers de Baffo.

Ce livre est donc destiné à un public averti, certes, mais à un public esthète.

lundi 4 juin 2007

Moi, vu par moi

Qu'ils aient été peintres, sculpteurs ou graveurs, de remarquables artistes ont marqué l'histoire des arts du dix-huitième siècle. Mais il n'est pas toujours aisé de mettre un visage sur leurs noms. Fort heureusement, Philippe Renard, déjà auteur d'une superbe monographie sur Jean-Marc Nattier (éditions Monelle Hayot), a publié Portraits & autoportraits d'artistes au XVIIIe siècle (2003, éditions La Renaissance du livre, collection Références, ISBN 2-8046-8016-6). Et voilà qu'au-delà de têtes connues, si j'ose dire, comme celles de Quentin Latour ou de Fragonard, cet ouvrage nous fait découvrir un Van Loo, un Watteau, un Vernet.

A l'huile, au pastel, à la sanguine, à la pierre noire, pas moins d'une centaine de portraits et autoportraits dans cette superbe galerie.
Le livre s'ouvre sur une étude fort didactique sur « le portrait français au XVIIIe siècle », et se termine sur un dictionnaire des peintres.

Alors, pas de tergiversation : offrez-vous cette galerie, et ne la laissez pas dormir sur une étagère, mais régalez-vous de temps en temps en vous y replongeant.

dimanche 3 juin 2007

Dessins et bulles : les trésors de l'île

L'île au trésor (Treasure Island) de Robert Louis Stevenson fait partie des premiers romans d'aventures que j'ai lus, et certainement un des premiers romans maritimes et « piratesques ».
Il a fait l'objet d'un grand nombre d'adaptations pour le grand et le petit écran, et j'y reviendrai dans un autre billet.
Mais le monde de la bande dessinée n'a pas délaissé, lui non plus, les trésors de ce récit.

Le site de la Bédéthèque, mon passage incontournable quand me viennent des questions sur la BD, référence celles-ci :
- celle de chez Walt Disney [1958, éditions Edicoq, fiche Bédéthèque] ;
- celle de De la Fuente [1973, chez Nathan ; fiche] ;
- celle de Pratt, avec deux éditions [en 1980 aux Humanoïdes Associés et en 1988 chez Casterman ; fiche]
- celle de Corteggiani et Faure [en 1991 chez Dargaud, et en 2002 chez Théloma ; fiche] ;
- celle de Joubert [1992, éditions Fleurus ; fiche].

Dans ma bibliothèque personnelle, j'ai les versions de De la Fuente, Pratt, Joubert et Corteggiani & Faure.
Malgré la très profonde affection que j'ai pour l'oeuvre d'Hugo Pratt, sa version de l'Ile au trésor n'est pas celle qui m'enchante le plus. Son dessin y est encore trop crayonné à mon goût, pas encore assez épuré comme il le deviendra pour les derniers albums de Corto Maltese.


Ma préférence va plutôt à celle de François Corteggiani, tant pour le trait que pour la mise en couleurs.

Je note cependant que, depuis le début des années 1990, soit près de quinze ans déjà, cette Île au trésor n'a pas fait l'objet d'une nouvelle adaptation directe en bandes dessinées, mais uniquement la réédition de la version de Corteggiani & Faure.

Qui sait si quelques autres artistes relèveront à nouveau le défi, tentant de faire du neuf avec du vieux ? Christophe Blain, avec sa série Isaac le Pirate a clairement montré que de nouvelles approches dans le graphisme et le récit peuvent apporter un vent nouveau dans les voiles des navires des pirates.



Xavier Dorison & Mathieu Laffray, eux, ont choisi une autre voie : nous raconter, sur Long John Silver, tout ce que le roman de Stevenson ne nous a pas dit [série Long John Silver, chez Dargaud ; fiche]. Un graphisme d'une grande force, qui vous prend par la main et vous entraîne dans les flots, à vous en faire perdre le souffle. Vous aussi, laissez-vous emporter !

samedi 2 juin 2007

Corsaires et gentilshommes

Le premier jeu de rôles auquel j'ai joué et qui avait pour décor le XVIIIe siècle est Privateers & Gentlemen. C'est, d'ailleurs, un des premiers JDR que j'ai achetés, au début des années 1980.
A l'époque, j'étais déjà un peu porté vers le XVIIIe, mais sans savoir à quel point j'allais en être mordu quelque temps plus tard. Cependant, j'étais déjà mordu des choses maritimes et d'aventures de cape et d'épée ; ce jeu-là ne pouvait donc que me tendre les bras.

Je passerai brièvement sur l'aspect formel de ce jeu. Comme les autres jeux de cet éditeur, Fantasy Games Unlimited, la forme est médiocre, même comparée à d'autres jeux publiés à la même époque : mise en page plus que dépouillée, illustrations médiocres, mauvaise organisation de l'ouvrage rendant la lecture difficile.
Pour ce qui est du fond, il faut dire que c'était un jeu plutôt spécialisé. Il s'agissait en effet d'incarner des personnages vivant des aventures essentiellement maritimes, soit des corsaires (les "privateers" du titre du jeu), soit des officiers de la marine (les "gentlemen").
Alors, avec Privateers & Gentlemen (P&G), il se passe un peu la même chose qu'avec la lecture des romans maritimes contant les aventures d'officiers de marines (par exemple en français et en format de poche, la saga de Hornblower, racontée par C. S. Forester, ou celle de Jack Aubrey, sous la plume de Patrick O'Brian) : ou vous êtes fan (et vous connaissez les noms des cordages, savez distinguer le petit perroquet du grand cacatois et un lougre d'un cotre, auquel cas vous pouvez visualiser dans votre tête les évolutions d'un navire qui vire de bord), ou bien vous décrochez.
Dans P&G, si jamais vous jouez avec un maître de jeu peu inventif ou souhaitant coller à la "réalité" des missions d'un officier de la Royal Navy, vous risquez de passer du temps à vous faire botter le cul par la vilaine houle d'hiver devant Brest. Pas vraiment réjouissant comme perspective pour une partie de JdR.

Bref, P&G est un JdR pour spécialistes (ou pour masochistes) si l'on s'en tient au jeu lui-même et aux informations qu'il donne dans ses livrets. Et pourtant, avec de l'imagination ou une bonne bibliothèque (ou, mieux encore, les deux à la fois), il y a de quoi créer de belles et bonnes campagnes de JdR. En fait, ce sont des aspects à peine évoqués, à peine entraperçus dans P&G, qui peuvent donner toute leur saveur à des aventures "maritimes". Ce sont des épisodes vraiment maritimes (poursuite, combats navals, contrebande) alternés avec des épisodes terrestres dans des lieux à empreinte maritime (toute la richesse de la vie des ports, des chantiers navals, du monde trouble des contrebandiers), et des épisodes purement terrestres (que ce soit dans les salons des amiraux pour y négocier une promotion ou dans l'antre d'un géographe pour y dérober des cartes).
P&G, en tant que JdR, ne fait donc qu'entrouvrir une porte sur la salle au trésor. Mais il faut croire que quelqu'un n'avait pas assez graissé les gonds.

Pour ma part, et au risque de passer pour vantard, il me semble avoir réussi à utiliser ce jeu pour embarquer avec moi des joueurs dans des aventures variées et plaisantes. Mais, outre le fait que ce jeu est épuisé de longue date et donc difficile à trouver aujourd'hui, j'ai tendance à penser qu'il ne constituerait pas une excellente porte d'entrée vers le JDR d'ambiance dix-huitièmiste, du fait de sa trop grande spécialisation maritime.



Si vous êtes déjà rôliste et donc un peu au fait des notions particulières au JDR, vous pourrez lire la critique plus détaillée que j'ai publiée sur le site du GROG, sous le pseudonyme que j'emploie dans les forums rôlistes, à savoir "Xaramis". Cliquez sur ce lien-ci, et vous trouverez le lien vers ma critique dans la partie gauche de la page.

vendredi 1 juin 2007

L'art de vivre des libertins

Il est triste de voir à quel point notre époque en est arrivée à méjuger, voire mépriser, le libertin, tant ce terme a fini par être détourné de son sens, pour tendre à ne désigner que l'amateur de relations échangistes ou de pratiques débridées. Cela me semble bien pauvre par rapport à ce que cela pouvait signifier au XVIIIe siècle. Difficile, certes, de prétendre que les libertins de ce temps-là n'étaient que des philosophes bousculant, à leur manière, l'ordre établi, qu'il soit moral ou religieux. Mais j'ai tendance à y voir, toutefois, au-delà de la seule licence des mœurs, un certain art de vivre, un art de la séduction, dans ce mélange des plaisirs de l'esprit et du corps.

C'est cette nature, complexe et non simpliste, que nous invite à découvrir La France au temps des libertins, un ouvrage concocté à plusieurs mains par Jacqueline Queneau (sociologue), Jean-Yves Patte (historien d'art et musicologue), Alexandre Bailhache (photographe) et Caroline Lebeau (styliste), aux éditions du Chêne (2001, ISBN : 2842772989).
Le livre, soutenu par de superbes photographies, aborde aussi bien les décors intérieurs et extérieurs des maisons et parcs où se tissaient les relations, que les parfums et les cabinets de curiosités, ou encore l'art des mouches et les dîners galants, les plaisirs de la chasse et de l'opéra.
Le livre se termine sur un cahier fermé regroupant des reproductions de gravures (d'après Antoine Robel ou François Boucher, par exemple), et des extraits de textes libertins (Mirabeau, Boyer d'Argens, etc.).

Un ouvrage superbe.